100 ans après, essayer de comprendre l’histoire

C’est un des sites emblématiques de l’Alsace : le « Hartmannswillerkopf » ou « Vieil Armand ». Pendant la guerre 14-18, troupes allemandes et françaises s’y sont livrés des batailles furieuses. L’ouverture d’un « historial  franco-allemand de la Grande Guerre» permet de mieux appréhender les enjeux de la Première Guerre mondiale.

Dernière édition : 31 août 2017

Les visites d’anciens champs de batailles, de mémoriaux divers, de cimetières militaires font partie de ce qu’on appelle « tourisme de mémoire ». Des visites certes nécessaires pour ne pas oublier les horreurs de la guerre, de n’importe quelle guerre.

Mais ces visites laissent souvent désemparé. Ou ne nous touchent pas vraiment.
Le Hartmannswillerkopf en Alsace,  fait partie de ces lieux de mémoire avec une crypte, un champ de bataille, des vestiges qui rappellent les terreurs vécues par les soldats français et allemands.

Mais l’historial qui vient d’ouvrir ses portes après trois ans de travaux apporte une autre dimension à ce lieu sur les sommets vosgien. Ce n’est pas un site de mémoire de plus mais un lieu qui explique l’histoire et qui s’adresse à un vaste public. C’est surtout un site franco-allemand : ici, point de revendications stériles, ni de « ici les méchants, là les gentils ».

L’Historial a permis de passer de la confrontation à la coopération. Un groupe d’éminents historiens français et allemands, ont travaillé ensemble pendant quatre ans pour définir ce projet ambitieux, de faire de ce nouveau bâtiment une véritable porte d’entrée dans la mémoire et de permettre à un vaste public de le franchir. De toucher aussi bien les personnes férues d’histoire, mais aussi des familles ou des touristes de passage qui ne veulent pas être forcément confrontés aux récits d’horreur de la guerre.  Se posait aussi la question s’il était vraiment  nécessaire, 100 ans après, de construire un site pareil.

La réponse est oui.  Alors que les souvenirs des deux dernières guerres s’estompent et que les extrêmes gagnent en puissance, il fallait créer un lieu qui ne rappellent pas simplement les horreurs de la guerre mais qui explique le processus : « Comment a-t-on pu en arriver là » peut-on d’ailleurs lire sur un panneau. Il faut transmettre cette mémoire de la guerre avec un  appel à la paix et au renforcement de l’Europe. Cette « entente cordiale » entre historiens français et allemands illustre à la merveille la réconciliation franco-allemande. Avoir créé, ensemble, ce site, est un symbole fort.

Il fallait aussi montrer que la guerre n’est pas quelque chose de lointain, d’un autre temps : c’était bien des jeunes hommes qui se sont engagés, qui ont laissé leur vie.
Un film d’introduction d’une quinzaine de minutes dans l’auditorium décrit les prémices de la guerre, aide à mieux comprendre ce processus qui a fini par déclencher la Grande Guerre, incite à réfléchir.

La scénographie de l’historial est remarquable. Elle rend compréhensible le champ de bataille du Vieil Armand mais aussi la Grande Guerre dans son ensemble. Plusieurs thématiques sont  présentées de façon claire grâce à de nombreux graphiques, de bornes audiovisuelles et interactives : la logistique pour du transport,  l’engagement, la vie des femmes, les hommes dans la guerre, la montagne de la mort…. Des textes écrits par des soldats, allemands et français, sont plus poignants que n’importe quel documentaire officiel. Chacun peut d’ailleurs emporter un texte.

En poursuivant la visite, on apprend également toutes les particularités d’une guerre de montagne (le champ de bataille du Vieil Armand étaient sur les hauteurs des Vosges) comme  les difficultés d’acheminement des troupes, du matériel (les Allemands ont même construit des téléphériques). Des images de soldats donnent un visage humain à l’histoire.

Puis, le visiteur s’enfonce comme dans une tranchée au cœur du bâtiment. Là, dans le noir, il est comme plongé dans les combats : des vidéos d’époque montrent toute la violence des combats sur cette montagne appelée « mangeuse d’hommes »…

On est soulagé de ressortir de cette « bulle », de retrouver la luminosité du bâtiment qui est une réussite architecturale. Des vastes baies vitrées ouvrent sur la nature et la plaine d’Alsace, des boiseries claires proviennent des forêts environnantes, la charpente impressionnante rappel les nervures d’une feuille.et c’est comme une feuille gante que l’historial est posé dans le paysage, servant de porte d’entrée sur le site du Hartmannswillerkopf : un « autel de la Patrie qui domine la nécropole regroupant plus de  1256 tombes et six ossuaires, une crypte, véritable cathédrale souterraine.

http://www.memorial-hwk.eu/

L’Historial est ouvert jusqu’au 12 novembre tous les jours de 9h30 à 17h30 (18h en été).
Tarifs : 5 €, gratuit pour les enfants de moins de 10 accompagnés d’un adulte
Un agréable espace restauration permet de goûter des petits plats élaborés à partir de produits frais de producteurs locaux

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